« La nuit, tous les chats sont gris », et pas seulement les chats. La Nuit qui enveloppe toutes choses de son grand manteau étoilé efface toutes distinctions, toutes limites. On n’y distingue plus formes ni couleurs. Elle recrée la grande Unité, certains éprouvant la peur de s’y perdre ou au contraire l’oubli bienfaisant de soi-même. Et c’est au matin que le monde entier réapparait dans sa diversité colorée, son relief, ses formes reconnaissables et que l’on retrouve les éléments spécifiques de notre personnalité et de notre biographie.
En nous, la force de Nuit (on doit ce concept astrologique à Dane Rudhyar), aspire à retrouver l’origine, la source, ce qui est commun à tous. Les signes du zodiaque marqués par la force de Nuit en croissance, depuis le Cancer, subissent l’attraction de cette invitation au retour et recherchent ce qui les unit aux autres. Ils sont en quête de ce qui rapproche, ce qui est partagé, ce qui rassemble. Peut-être avez-vous d’ailleurs connu cette expérience de raconter votre vie la nuit à de parfaits inconnus dont vous vous sentiez, à ce moment-là, plus proches qu’en plein jour : la Nuit invite aux confidences. On se sépare le jour venu, chacun retrouvant un peu de ce quant à soi qui s’était mystérieusement évanoui.
La force de Nuit est généralisante, elle pousse l’être qu’elle anime à prendre de la hauteur de vue, à « dézoomer ». Le héros toutes catégories du dézoom est bien le Sagittaire, celui qui tire sa flèche vers le sommet de la montagne et qui guide sur les chemins ardus ceux qui souhaitent y atteindre (et les autres aussi, bien malgré eux quelquefois, le Sagittaire n’est pas regardant et entraîne avec lui dans son sillage ceux qui n’en demandaient pas tant…). De là-haut, la vue porte et de nouveaux horizons se révèlent, lointains, majestueux. Mais la vie de la vallée semble si minuscule et insignifiante, à cette distance, les maisons ne sont plus que des petits points, tous semblables, les détails et les particularités ont disparu.
Le Sagittaire a été porté au sommet par la force de Nuit et au solstice, celle-ci culmine. Le temps est venu de l’inversion des pôles, de la décroissance de la Nuit et de l’émergence du Jour. C’est le temps du Capricorne et son défi. Le Capricorne touche le ciel de sa main tendue, mais il ne peut monter plus haut. Que choisira-t-il ?
« Puissant et solitaire », tel le Moïse de Vigny, restera-t-il campé sur son rocher, à défendre sa position (il y a peu de place au sommet), devenant roc lui-même, dans un effort stérile pour arrêter le cycle de la vie ? Ou fort de ce qu’il a pu contempler, redescendra-t-il vers la vie insouciante de la vallée se mêler aux sons, aux odeurs, aux activités humaines, plonger le nez dans l’herbe, observant la force de Jour qui anime chaque brin d’herbe ? Car la force de Jour est bien à l’œuvre dans le particulier, dans chacune des graines qui s’active au sein de la terre en ce tout début d’hiver. Et c’est elle qui fera jaillir le printemps prochain la beauté spécifique de chaque fleur en elle-même. Le printemps est affaire individuelle. La vie s’exprime dans le Un diversifié, la multiplicité de l’Unique, le singulier et le spécifique.
Noël est l’image parfaite de l’archétype du Capricorne : une communauté se rassemble pour fêter et célébrer le renouveau : ce qui se manifestera grâce à la force de Jour croissante, la naissance de l’individualité, du moi porteur de vie, porteur d’espoir. Gardienne de l’Unité, le Capricorne est alors la matrice qui accueille et protège les nouvelles expressions de la vie, nécessairement différentes et distinctes, quoique procédant de la même source.
Le rôle du Capricorne est de maintenir la connaissance de l’Unité primordiale et d’organiser la coexistence d’impulsions fraîchement nées pour les mener jusqu’à leur pleine manifestation au printemps. Il est le pont entre l’incréé et la vie révélée dans sa splendeur foisonnante.
Que nos institutions (Capricorne ô combien !) en prennent de la graine : leur mantra devrait être : permettre le renouveau, accueillir les nouvelles impulsions qui rajeunissent le vieux monde sclérosé ! Il y a comme du boulot !
En attendant, et en ce passage du solstice d’Hiver, je vous souhaite un beau Noël plein de sens et d’affection !
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